Le port du masque FFP2 en établissement médico-social : une protection sur mesure

28 mai 2025

Pourquoi parle-t-on spécifiquement du masque FFP2 ?

Au sein des établissements médico-sociaux — EHPAD, foyers de vie, structures pour personnes en situation de handicap — la question du port du masque revient régulièrement, notamment en période d’épidémie. Le masque FFP2 n’est pas un simple masque chirurgical amélioré : il offre un haut niveau de filtration, supérieur à 94% des particules d’au moins 0,6 micron; il protège donc à la fois le porteur et les résidents, y compris contre les aérosols (source : ANSM, INRS).

Mais quand ce niveau de protection est-il vraiment nécessaire ? Qui doit le porter, dans quelles situations, et pourquoi pas toujours ? Pour répondre concrètement, il faut considérer les risques rencontrés dans le quotidien des établissements, les recommandations officielles, et l’équilibre entre confort, efficacité et contraintes d’usage.

Différences entre le masque chirurgical et le masque FFP2

  • Le masque chirurgical protège l’environnement du porteur : il limite la projection de gouttelettes (toux, éternuements) mais filtre peu les particules inhalées.
  • Le masque FFP2 protège le porteur et l’environnement : il filtre l’air inspiré et expiré (efficacité ≥94%) et est conçu pour être hermétique au visage.

Le FFP2 est donc fait pour les situations à plus haut risque d’infection par voie aérienne, ou pour protéger des personnels vulnérables eux-mêmes.

Les situations où le port du FFP2 est recommandé ou obligatoire

1. Risque avéré ou suspecté de transmission aéroportée

Le masque FFP2 devient impératif face à des agents infectieux capables de rester en suspension dans l’air, notamment :

  • COVID-19 : lors de soins générant des aérosols (aspiration endotrachéale, ventilation non invasive, aérosolthérapie), la Haute Autorité de Santé (HAS) et le Haut Conseil de Santé Publique (HCSP) recommandent expressément le FFP2 (voir recommandations HCSP, juillet 2022).
  • Tuberculose : tout soin auprès d’un résident présentant une suspicion ou une confirmation de tuberculose pulmonaire, en attendant la levée d’isolement aéroporté.
  • Varicelle, rougeole sévère : si un résident est atteint, les soignants non-immunisés doivent porter un FFP2.

2. En cas de cluster ou d’épidémie

Dans un contexte d’épidémie intracétablissement (COVID-19, grippe, voire infections respiratoires non identifiées), plusieurs ARS ont recommandé le port du FFP2 pour les personnels en contact rapproché avec des personnes infectées ou suspectes, surtout si la vaccination est incomplète.

  • Selon l’INRS et Santé publique France, lors des vagues épidémiques COVID-19 (Delta, Omicron), le FFP2 a réduit le risque d’infection des soignants de 53% par rapport au masque chirurgical (JAMA, 2022). Cette efficacité reste élevée pour d’autres virus aéroportés.

3. Protection des personnels vulnérables

Selon la circulaire interministérielle du 9 août 2021, les professionnels immunodéprimés, souffrant de pathologies chroniques sévères (liste à retrouver sur Ameli.fr) doivent pouvoir bénéficier de FFP2 si leur poste les expose à des contacts répétés avec des résidents potentiellement infectés.

4. Entretien des locaux et gestion des déchets infectieux

Les agents réalisant le nettoyage de chambres de résidents en isolement aéroporté, ou manipulant du linge ou des déchets issus d’une chambre en isolement, doivent eux aussi porter un FFP2.

Quand l’usage du FFP2 n’est-il pas indiqué ?

Porter un FFP2 en continu est contraignant : gêne respiratoire, chaleur, fatigue. Il n’est donc ni obligatoire ni souhaitable dans toutes les situations :

  • Soins courants auprès de résidents sans signe clinique ni diagnostic d’infection transmissible par voie aérienne.
  • Situations de contacts sociaux non rapprochés (animations, restauration collective, promenades extérieures).
  • Lorsque l’aération des locaux est optimale et que le taux de contamination est nul ou très faible.

À noter : l’utilisation abusive du FFP2, en dehors des recommandations, provoque un inconfort pour les professionnels, augmente le risque d’erreur de manipulation et aggrave les coûts pour l’établissement (source : ANACT « Le port du masque et la prévention », 2021).

À propos du port du FFP2 chez les résidents

Le port du FFP2 par le résident lui-même n’est que rarement indiqué. Pour la majorité, son port est difficile (pathologies respiratoires, démence, inconfort). En cas de transport médicalisé ou lors de soins rapprochés au contact d’un professionnel vulnérable, un masque chirurgical est préféré lorsqu’il est toléré.

Focus sur l’ajustement : la clé de l’efficacité

Pour que le FFP2 protège vraiment, il doit épouser parfaitement le visage :

  • Le test d’ajustement (fit test), recommandé par l’INRS, est indispensable en cas d’utilisation répétée : un masque mal ajusté perd jusqu’à 60% de son efficacité.
  • Il est à usage unique (généralement 4 à 8 heures), et doit être changé en cas d’humidité ou de souillure.
  • L’enlever/repositionner dans la journée réduit son pouvoir filtrant ; évitez de le garder autour du cou ou sur la tête entre deux utilisations.

Seules 58% des soignants déclaraient effectuer un ajustement complet lors des pics de la pandémie COVID-19 (données EPI-Soins, 2022).

Quels masques FFP2 choisir ? Certifications et bonnes pratiques

Un masque FFP2 utilisé en établissement médico-social doit répondre à la norme EN 149:2001 + A1:2009, marquage CE visible. Les modèles à valves ne sont pas adaptés dans ces structures : ils protègent le porteur mais laissent passer l’air expiré, ce qui expose les résidents.

  • Privilégier les modèles adaptés aux morphologies faciales courantes, avec pince-nez réglable et élastiques confortables.
  • Stockage à l’abri de l’humidité et de la lumière.

En 2020-2021, la proportion de masques défectueux ou non conformes a dépassé 10% dans certains établissements (source : DGCCRF, enquête de mai 2021).

Retours terrain : situations concrètes rencontrées

  • Une aide-soignante en EHPAD a dû porter un FFP2 lors d’une suspicion de tuberculose chez un résident, le temps des prélèvements et de l’isolement : la durée de port a été limitée à 3 heures, remplacée par une alternance avec une collègue.
  • En cas de cluster COVID-19 dans un secteur fermé, l’équipe a porté des FFP2 pendant 7 à 10 jours, jusqu’à l’absence de nouveaux cas. L’aération et l’organisation du travail ont été adaptées pour limiter le nombre de changements de masque et permettre des pauses régulières.

Textes et recommandations de référence : quelles obligations ?

  • HAS – Prise en charge des patients hors hôpital (2023) : FFP2 systématique pour gestes à risque chez patients suspects/confirmés COVID-19, tuberculose, varicelle, rougeole.
  • Instruction interministérielle du 9 août 2021 : doit être mis à disposition des professionnels vulnérables.
  • INRS – ED 145 (2022) : rappelle les indications précises et les bonnes pratiques de port.
  • Santé publique France : préconise l’ajustement systématique et la formation du personnel.

Outils pour informer et former les équipes

  • Affiches sur les portes de chambres en isolement : « Port du FFP2 obligatoire » en complément du protocole de gestes barrières.
  • Séances de formation à l’ajustement et au retrait sans contaminer le visage ni l’environnement.
  • Documents d’auto-surveillance des stocks de FFP2 pour éviter les ruptures, surtout en période épidémique.

Rappels à garder en tête pour le quotidien

  • Il vaut toujours mieux privilégier l’adéquation de la protection au risque : ni banaliser, ni surprotéger.
  • Le port du FFP2 n’exonère jamais des autres mesures barrières : hygiène des mains, aération, vaccination, organisation du travail.
  • L’écoute des équipes est essentielle : la tolérance, le ressenti, les difficultés doivent être remontés régulièrement.

Vers une utilisation raisonnée et collective du FFP2

Le masque FFP2 en établissement médico-social reste un outil de haute efficacité, mais ponctuel : il répond à des situations ciblées, pour des risques majeurs, en complément d’une démarche globale de prévention. Faire le choix du FFP2, c’est appliquer une mesure d’anticipation, de protection des plus fragiles, mais aussi de soutien concret aux professionnels, en leur assurant le niveau de sécurité adapté à chaque contexte.

Pour aller plus loin ou retrouver des documents à jour, se référer régulièrement aux sites : HAS, INRS, Santé Publique France, sans oublier l’ANSM pour la réglementation sur les équipements de protection individuelle.

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